L’assassinat d’Abou Jihad en Tunisie (1)
Défendons l’indépendance de la Tunisie !
Arrêtons lagent sioniste Ben Ali !
Jugeons-le pour haute trahison, complicité dans l’assassinat d’Abou Jihad et pour crimes de torture !
Le sionisme ne souillera pas la Tunisie !
par Mondher Sfar
L’invitation de Sharon ne m’a pas ému outre mesure. Depuis le 7 novembre 1987, ou plutôt depuis janvier 1984, je savais que la Tunisie était tombée entre les mains d’un agent secret du renseignement au service de l’Amérique et d’Israël opérant contre son pays et trahissant l’honneur de sa patrie.
Nous avons la certitude aujourd’hui de l’implication personnelle de Ben Ali dans la grande opération israélienne d’assassinat d’Abou Jihad dans la nuit du 15 au 16 avril 1988. Les déclarations élogieuses et insistantes des présidents américains sur le rôle de Ben Ali dans le ‘processus de paix’ amenant l’acceptation par l’OLP de l’entité sioniste en tant qu’Etat, l’inauguration de relations diplomatiques, économiques… avec Israël, et la révélation par l’ennemi sioniste de l’invitation secrète du criminel Sharon par Ben Ali constituent autant d’indices qui ne trompent guère sur l’ampleur de la trahison de cet agent.
L’étude sommaire de l’assassinat d’Abou Jihad en avril 1988, suffit à démontrer la participation personnelle active et passive de Ben Ali au crime. Il ressort de notre enquête que Ben Ali a été averti bien à l’avance du moment de l’opération. Il a reçu des consignes de ne pas bouger de son bunker de Carthage, de ne pas réagir et de laisser faire jusqu’à la fuite des exécuteurs. Ce qu’il a fait en ‘bon élève’. Il s’est même permis de demander à Ganzoui, responsable de la sécurité publique, d’opérer une rafle mémorable à Sidi Bousaïd, village où résidait Abu Jihad, quelques heures avant l’assassinat, question de vider les rues et de ne laisser circuler que le commando dans les ruelles désertes et sans témoins gênants.
Quand le Boeing 707 israélien à bord duquel se trouvaient ses amis Ehud Barak et sans doute Sharon s’est présenté la nuit du 15 au 16 avril 1988 vers 1h30 au large des côtes de Sidi Bousaid, à 3 Kms du Palais présidentiel de Carthage, pour superviser les opérations qui se déroulaient sur la colline de Sidi-Bou avoisinante, Ben Ali pouvait les observer, sans bouger.Alors que l’avion ennemi violait l’espace aérien de Sidi Bousaïd-Carthage présidence, aucun ordre n’a été donné aux forces armées pour l’attaquer : Ben Ali s’est contenté d’observer la scène, lui et certaines unités militaires tunisiennes, qui se sont contentées de relever consciencieusement la nationalité israélienne de l’appareil, étant frappé de l’étoile de David, et son immatriculation : ‘4×977’. Elles étaient empêchées d’agir par des consignes venues de Ben Ali, chef des forces armées.
La version tunisienne de l’enquête rapportée par les journaux gouvernementaux, affirme même que les forces ennemies (le Boeing 707) ont coupé les téléphones de la villa d’Abou Jihad et du commissariat de police du village. Ainsi, bizarrement, le téléphone du Palais de Carthage – qui abrite le commandement suprême des forces armées tunisiennes, et se situant au beau milieu de l’opération militaire israélienne – ce téléphone n’a pas été interrompu !
Cependant, la consigne que Ben Ali a reçue de ses patrons israéliens de ne pas bouger de son Palais, il l’a interprétée à la lettre : après la fin de l’opération, Ben Ali ne s’est même pas rendu à la villa d’Abou Jihad pour voir ce qui s’était passé à 3 kilomètres de son Palais, ni même pour consoler la femme et la fille du martyre palestinien durement éprouvées en cette sinistre nuit, lui à qui incombait pourtant la responsabilité de leur sécurité. Non, le vaillant Ben Ali a préféré se calfeutrer dans sa chambre à coucher, et charger son acolyte des opérations sérieuses Habib Ammar, d’aller sur place, car bien plus courageux que lui, comme lors du coup d’Etat du 7 novembre au cours duquel Ben Ali s’est tapi sous les meubles du ministère de l’Intérieur (alors qu’il était Premier ministre !), en attendant l’issue des opérations décisives d’occupation du Palais de Carthage menées par le même Habib Ammar. Ben Ali est resté plusieurs jours cloîtré dans son bunker à Carthage, attendant des consignes claires de ses maîtres israéliens.
Car Ben Ali ne comprend plus rien. Comment ses maîtres osent-ils opérer à sa barbe, lui intimer l’ordre de les laisser faire et de ne jamais réagir, et même de l’obliger à préparer le terrain en vidant les rues de Sidi Bousaid de ses passants, alors qu’il était entré depuis des années à leur service, notamment pour infléchir la direction palestinienne vers la reconnaissance d’Israël ? Or l’attaque israélienne ne pouvait que le mettre en porte-à-faux face à l’Armée, face à ses services de sécurité et face au peuple.
En outre, l’opération ne pouvait que le contraindre à faire semblant de s’attaquer publiquement à son allié Israël, et prendre ainsi le risque, même minime, de se l’aliéner à son corps défendant. Pour clarifier les choses, Ben Ali fit parvenir aux Israéliens un message de bonne volonté lors de l’intervention de son ministre des Affaires étrangères devant le Conseil de Sécurité, six jours après l’assassinat d’Abou Jihad, affirmant clairement sa crainte de voir remettre en question son choix stratégique pro-israélien : « Il est fort regrettable que cette agression soit intervenue à un moment où les initiatives et les bons offices se sont multipliés en vue d’apporter un règlement au problème du Moyen-Orient (…) Comme si les auteurs de cet acte ont voulu décourager ces efforts et annihiler l’effet de ces démarches de bonne volonté. » (La Presse de Tunisie, du 23 avril 1988, p. 4.)
Le message est clair : vous m’avez contraint à participer à l’assassinat, vous m’obligez seulement de gueuler contre vous en public, mais je suis toujours votre homme ; ne me laissez pas tomber.
Message reçu cinq sur cinq par Israël.
Naturellement, aucune enquête n’a été ordonnée par Ben Ali – même pas pour la forme – pour déterminer des responsabilités locales (hormis la sienne et celle de ses proches au ministère de l’Intérieur !), en dehors de l’enquête préliminaire qui n’en a pas été une puisque qu’elle puisait ses informations dans les journaux étrangers ! Beaucoup plus grave, quand l’enquête publiée neuf ans plus tard par le journal israélien Maariv du vendredi 4 juillet 1997 eut dénoncé la complicité active « de hauts fonctionnaires tunisiens » dans l’assassinat d’Abou Jihad, Ben Ali n’a pas cillé : l’information n’a jamais été révélée aux Tunisiens et naturellement aucune enquête n’a été ordonnée, ni publique, ni secrète. Et pour cause !
Ce n’est pourtant pas la première fois qu’il arrive à cet homme du renseignement, à ce « Monsieur sécurité », une pareille mésaventure où il dut agir activement et/ou passivement pour mettre la sécurité du pays en péril : sa participation au détournement de l’avion de Tunis Air du 12 janvier 1979, l’attaque de Gafsa de 1980 par un commando venant de Libye, l’attentat à l’explosif des hôtels à Sousse et à Monastir le 2 août 1987 et l’incendie criminel du local de Bab Souika le 2 mars 1991 : nous possédons aujourd’hui les preuves de son implication personnelle dans toutes ces opérations.
Ben Ali n’est pas ‘Monsieur sécurité’, c’est plutôt ‘Monsieur complot’. Et sans conteste, son plus grand complot, de loin le plus grave, ce n’est pas celui contre Bourguiba, c’est celui contre l’honneur et les intérêts supérieurs de la patrie, c’est celui contre la juste cause palestinienne, contre la cause du monde arabe auquel nous appartenons et contre la paix et la fraternité entre tous les peuples, y compris avec les juifs qui sont les premières victimes du sionisme mondial depuis sa création en 1897.
Le grand crime de Ben Ali est son alliance secrète et non secrète avec l’ennemi Israël, qui plus est reste l’auteur du bombardement sanglant de la Tunisie en 1984.
L’invitation secrète et personnelle de Ben Ali à Sharon est aussi un chef d’œuvre de duplicité et de complicité intime entre Sharon et Ben Ali. Elle a été planifiée par les chefs du sionisme mondial qui depuis quelques mois ont décidé de donner un coup d’accélérateur non pas à la normalisation de leurs rapports avec les dictateurs arabes, – une normalisation déjà largement acquise – mais seulement à l’officialisation de cette normalisation secrète et de fait. Pour pousser Ben Ali à cette extrémité, il y eut des rencontres secrètes entre les ministres des Affaires étrangères israéliens et tunisiens en Europe. Ces contacts ont été couronnés par une rencontre semi-secrète à Carthage entre Ben Ali et Joseph Sitruk, Grand Rabbin de France, et un des leaders du sionisme mondial, venu accompagné d’une délégation israélienne de 60 personnes dirigée par Pierre Besnainou, trésorier du Congrès Juif Européen, filiale du Congrès Juif Mondial. Cette rencontre secrète qui eut lieu le mardi 7 décembre 2004 a fait l’objet d’un montage médiatique d’une rare duplicité. Elle a été maquillée officiellement en une simple rencontre de Joseph Sitruk avec Ben Ali à l’occasion d’une prétendue participation au colloque international qui se tenait à ce moment sur le soi-disant ’dialogue des civilisations’. Bien entendu Sitruk n’a pas mis les pieds dans ce colloque.
Aucun média tunisien, ni même étranger, n’a soufflé mot de cette rencontre entre les Israéliens et Ben Ali. Cette opération secrète a été menée rondement non seulement avec la complicité des médias tunisiens, ce qui est compréhensible, y compris le journal soi-disant indépendant Réalités, mais aussi avec celle de l’AFP et de l’Associated Press qui n’ont pas dit mot de la réalité de cette rencontre, se contentant de débiter la version officielle tunisienne, de toute évidence en accord avec la partie israélienne. Et comme dans l’affaire de l’assassinat d’Abou Jihad, c’est la presse israélienne – Guysen News – qui a éventé le secret, et publié la photo de Ben Ali avec Besnainou.
Ainsi, dans un article du 20 décembre 2004, soit deux semaines après les faits, l’agence Guysen News révèle les dessous de cette rencontre décisive avec de hautes personnalités israéliennes : il est bien évidemment question d’accélérer, suite aux recommandations israéliennes, le rythme du calendrier de la normalisation et de l’officialisation de la présence politique et économique d’Israël en Tunisie, par un progrès décisif sur le plan diplomatique. La délégation entendait convaincre Ben Ali de recevoir officiellement des membres du gouvernement israélien : « Les questions relatives à l’ouverture à Tunis d’une représentation israélienne, rapporte Guysen News, et la venue en Tunisie de Shimon Pérez leader du parti travailliste et de Sylvain Shalom, ministre des affaires étrangères de l’Etat Hébreu ont été abordées, et le premier tunisien, Président en exercice de la Ligue Arabe, a laissé de ce côté une porte entr’ouverte avec l’espoir que les échanges entre les deux pays pourraient, dans un avenir prévisible, se normaliser et qu’en tout état de cause ‘Ces dispositions sont à envisager dans le cadre d’un calendrier qu’il n’entendait pas bousculer’ »
Ce qui ennuie manifestement Ben Ali, ce n’est pas le principe de la normalisation, mais la seule peur des réactions populaires, autrement dit, le prix politique à payer pour cette trahison. D’autres doléances de moindre importance ont été abordées et satisfaites telles que la normalisation de la venue des touristes israéliens en Tunisie.
Depuis cette rencontre semi-secrète à Carthage, la machine israélienne s’est emballée, conformément aux consignes données par Sharon : il faut aller vite ! Guysen ne dit pas toute la vérité, mais il se peut bien que le principe de la venue de Sharon ait été abordé lors de la rencontre du 7 décembre 2004, et même conclu. Ce qui nous intéresse ici c’est encore la trahison des Israéliens de leur protégé tunisien : ils ont éventé l’accord de la visite de Sharon et ils sont allés jusqu’à publier la lettre de Ben Ali à son ami Sharon ! C’est la énième fois qu’ils poignardent leur allié Ben Ali dans le dos et dénoncent au grand jour sa complicité dans les crimes dans lesquels il a bien voulu s’associer avec eux. C’est semble-t-il une tradition chez les sionistes qu’on peut observer en œuvre dès la première guerre mondiale. Une fois qu’ils ont gagné la complicité de quelqu’un (ou d’un pays), ils le dénoncent auprès des siens pour l’obliger à s’allier encore plus fermement avec eux. C’est la situation actuelle de Ben Ali : son sort à lui et à son clan des Trabelsi, est lié intimement avec celui de la présence sioniste en Tunisie et sa mainmise stratégique sur le pays. La violence de la répression des manifestants anti-Sharon et le communiqué de soutien de la Ligue de Défense Juive soutenant Ben Ali contre le peuple, sont les signes qui ne trompent pas de ce que le sort de Ben Ali est désormais et plus que jamais lié à celui du sionisme en Tunisie.
Mais la Tunisie vivra et saura triompher de ses ennemis intérieurs et extérieurs. Son sort, comme pour les autres pays arabes, est aussi celui du peuple palestinien. Si nous acceptons la loi sioniste, nous n’aurons plus que 22 % de nos terres que nous gérerons sous le contrôle israélien. Nous serons des étrangers dans notre propre patrie, ce que nous sommes déjà avec le traître Ben Ali ! Que sera-t-on si l’on nous impose aussi la loi sioniste ? Vivre dans des bantoustans ?
C’est l’heure de vérité pour nous Tunisiens. Combattons pour notre droit à la vie et pour notre droit à la dignité, pour nous et pour les générations futures.xCombattons l’impérialisme sioniste comme nos pères ont combattu l’impérialisme français. Combattons aussi le cancer sioniste aux côtés de nos amis juifs antisionistes qui ont souffert comme nous de cette idéologie raciste et criminelle depuis plus d’un siècle.
Nous vaincrons ou nous disparaîtrons !
Mondher Sfar msfar@wanadoo.fr
Notes supplémentaires de Mondher Sfar sur les sources de son article:
La plus importante source, je l’ai citée : Maariv du vendredi 4 juillet 1997 qui a donné un compte rendu exhaustif de l’opération en indiquant que de hauts fonctionnaires tunisiens sont impliqués dans l’affaire, mais Ben Ali, apres ces révélations n’a pas bougé le petit doigt pour retrouver ces hauts fonctionnaires – bien plus il a imposé un embargo sur toutes ces revelations qu’aucun journal tunisien n’a rapportées.
Deuxième source : la Presse de Tunisie organe officieux et entièrement sous la coupe du régime qui a rapporté les faits jour après jour apres l’assassinat, où l’on peut relever d’importants détails troublants qu’il a relevés dans la presse étrangère ainsi que le discours du Ministre tunisien des affaires étrangères devant le Conseil de Securité revelant que l’avion Awacs a survolé le territoire tunisien. On voit très bien à travers les articles du journal, qu’au départ il n’était pas question de s’en prendre à Israël même s’il est plus ou moins clairement désigné. Puis un changement de ton suite aux dénonciations internationales arabes et palestiniennes y compris dans certains milieux prosionistes. Dans un des éditoriaux de ce journal officieux l’on est allé jusuq’à préciser dans son numéro du 20 avril 1988 que « Le Président Ben Ali, patriote, sérieux, jaloux de la souveraineté et de l’indépendance de son pays, est déterminé à utiliser tous les moyens pour faire avorter les objectifs israéliens. » Ces précisions sur le patriotisme de Ben Ali et sur sa détermination à faire quelque chose en disent long sur l’opinion publique tunisienne qui dès le début a commencé à mettre en doute la loyauté de son Président qui est allé jusqu’à interdire toute manifestation de rue en faveur des Palestiniens.
Enfin, le dossier publié par l’Audace du mois d’Août 1997 journal d’opposition tunisienne à Paris signé par Slim Bagga et Mondher Sfar, (pages 16 à 19) où Slim Bagga, directeur du journal, témoigne personnellement qu’il était à Sidi Bousaid le soir de l’attaque et qu’il a vu de ses propres yeux l’opération de nettoyage par rafles policières ordonnées par M. Ganzoui, l’intime des Ben Ali et qui travaille pour le Mossad selon les dernières révélations d’un agent de la sécurité du Parti au pouvoir du temps de Bourguiba M. Chadly Ayadi (voir article « Faut-il croire à Zine al-Abidine Ben Ali ? » à lire sur le site Tunisnews du 28 octobre 2003.)